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Afrique du Sud: les éducateur·rice·s demandent de mettre fin à l’« apartheid » des droits d’auteur

Publié 27 février 2020 Mis à jour 28 février 2020

Le South African Democratic Teachers’ Union a organisé une manifestation pour pousser le gouvernement à signer un projet d’amendement modifiant la loi sur les droits d’auteur, qui permettra de faciliter l’accès à des ressources éducatives de qualité.

Comme l’explique le South African Democratic Teachers’ Union(SADTU), syndicat sud-africain affilié à l’Internationale de l’Éducation, ce projet d’amendement rendra caduques toutes les réglementations existantes en matière de droits d’auteur et permettra à chaque élève d’accéder aux ressources éducatives. Aux côtés d’autres syndicalistes, artistes et groupes militants, les membres du syndicat ont organisé un piquet de grève le 26 février dernier, devant l’ambassade des États-Unis à Pretoria, pour protester contre une pétition signée par plusieurs grandes sociétés de divertissement américaines se plaignant de ce projet de loi sur les droits d’auteur en passe d’être voté en Afrique du Sud.

Selon le syndicat, le système de protection de la propriété intellectuelle qui existe actuellement au niveau mondial « vise davantage à protéger les droits individuels des sociétés d’édition, au lieu de contribuer au développement des populations les plus pauvres en facilitant leur accès aux ressources éducatives ». Ce projet d’amendement visant à modifier la législation sur les droits d’auteur offrira certaines flexibilités permettant d’accéder à des œuvres protégées, dans le cadre de l’enseignement.

Objectif de développement durable 4

Le SADTU précise également que, si le montant des dépenses publiques pour l’éducation est effectivement plus élevé en Afrique du Sud que dans d’autres pays au revenu similaire, tout le monde n’a pas systématiquement accès aux ressources éducatives. Afin de pouvoir réaliser l’Objectif de développement durable 4 et les priorités du pays pour l’éducation, le SADTU demande au gouvernement de définir un « cadre législatif pertinent ». Ce dernier permettrait de « faciliter l’accès aux ressources et aux archives éducatives au bénéfice des élèves, du personnel enseignant, de la communauté universitaire et de l’ensemble de la société, sans aucune des restrictions héritées du régime de l’apartheid et instituées par les maisons d’édition multinationales, telles que la loi actuelle sur les droits d’auteur, en vigueur depuis les années 1970 ».

Présent hier à la manifestation, Xolani Fakude, Directeur du secrétariat du SADTU, a déclaré : « Le SADTU manifeste aujourd’hui aux côtés de plusieurs de ses partenaires sociaux pour demander au président de l’Afrique du Sud d’entériner le projet d’amendement relatif au droit d’auteur et celui portant sur la protection des artistes ».

Il a rappelé la position de son syndicat: « Cette loi permettra de protéger les auteurs et les maisons d’édition, tout en mettant un frein aux excès d’une poignée d’entre elles qui exploitent les marchés en imposant des tarifs injustifiés ». Xolani Fakude a souligné que, en Afrique du Sud, les quatre géants de l’édition « tirent des bénéfices prohibitifs des ressources d’apprentissage et d’enseignement et transforment le système d’éducation en marchandise ».

Les États-Unis menacent de prendre des sanctions commerciales

D’après plusieurs organisations de la société civile sud-africaines, les États-Unis d’Amérique font pression sur le pays pour le dissuader de signer le projet d’amendement en question, en menaçant de revoir les accords commerciaux préférentiels et de prendre des sanctions commerciales. Malgré cela, le syndicat encourage le gouvernement à faire prévaloir l’intérêt du pays, ainsi que son plan de développement national. « Partout dans le monde, les États-Unis se présentent en donneur de leçons, opposé à toute réforme du système de propriété intellectuelle et privilégiant les bénéfices engrangés par ses multinationales, comme les maisons d’édition et les moteurs de recherche basés sur Internet », peut-on lire dans une déclaration officielle du SADTU. Cette même déclaration cherche également à dissiper le mythe selon lequel ce projet de loi sur les droits d’auteur aurait potentiellement des répercussions négatives sur le marché de l’édition au niveau national.